
Ceinture noire : l’épreuve du Kata
Le passage de Grades pour la ceinture noire se compose de 6 modules : le Kihon, les Katas, les Bunkaï, Kihon Ippon Kumite (combat codifié à deux), Jiuy Ippon Kumite (assauts à deux) et Ju Kumite (ou Randori, combat libre). Nous allons, au cours d’une série d’articles, étudier la totalité de ces modules, qui vous seront demandé le jour du passage de grades. Etudions ici le KATA.

Module n°2 – Le KATA
Le principe : Exécuter face au jury deux Kata libres, à choisir dans la liste des Katas de 1er Dan de ton style. Le jury peut faire passer l’ensemble des candidats sur le 1er kata puis sur le 2e ; ou bien demander à chaque candidat de les enchaîner avec une pause de 30 secondes entre les deux (nos conseils retiennent prioritairement cette hypothèse).
Comment ça se passe ?
Citons la FFKDA :
« Le mot Kata, traduit littéralement, signifie forme. En Karaté, on le traduit par forme fondamentale ou conventionnelle. Il est primordial de ne jamais oublier qu’un Kata n’est pas un simple exercice de style. Il représente un combat dans ce qu’il y a de plus pur et de plus extrême et, à ce titre, il possède, comme ce dernier, un rythme propre. Ce n’est ni une course de vitesse ni un travail en lenteur. L’expression “vivre son Kata” traduit mieux que toute autre cette capacité que doit posséder le pratiquant, de contrôler tous les paramètres de son exécution, de telle sorte que le jury ressente cette impression de combat au travers de la démonstration qui lui est faite. Tout comme en Kihon, la “beauté” n’est pas un critère essentiel, mais l’efficacité est incontournable. »
Sur quoi tu es jugé ?
Ici encore, aidons-nous du règlement officiel :
>> La présentation : la tenue et le comportement du candidat doivent être impeccables : Karategi propre, ceinture correctement nouée, comportement et attitude générale irréprochable.
>> Le cérémonial et l’étiquette : le cérémonial (salut, prise de position, présentation) doit être scrupuleusement respecté. Le Kata est annoncé à haute voix, il commence et se termine par le salut.
>> La concentration : Dans sa démonstration, le candidat doit dégager une impression d’unité corps/esprit.
>> L’équilibre et la stabilité : les positions doivent être bien marquées. La position du bassin, de la colonne vertébrale, de la nuque et des épaules bien contrôlée. La maîtrise des déplacements est essentielle et toute perte d’équilibre, glissade ou chute sera « sanctionnée », sans être éliminatoire.
>> Le rythme et le tempo : les techniques enchaînées, les mouvements lents (s’ils existent dans le Kata présenté), les temps morts doivent être placés de manière judicieuse tandis que les Kiaï devront être placés selon les normes communément acceptées.
>> La puissance : les techniques doivent dégager une impression d’efficacité ; le regard doit être empreint de toute la détermination du candidat. Il doit suivre la direction dans laquelle les techniques ou enchaînements sont utilisés.
>> La respiration et le Kiaï : la respiration est le support de l’énergie, elle conditionne les moments de force et de faiblesse de notre organisme. Elle doit être correctement synchronisée avec les techniques, sauf pour certains Kata dit “respiratoires”, elle est inaudible. Un Kata comporte suivant les styles un, deux en général voire trois expirations sonores (Kiaï) qui expriment un dégagement maximum d’énergie.
>> Le respect des techniques et de l’embusen (diagramme original du Kata) : le Kata est exécuté dans sa forme originale, c’est-à-dire en respectant les positions, les techniques et les directions préconisées par le style ou l’école auquel se réfère le candidat.
Ce que tu dois maîtriser
Ce que tu dois maîtriser est simple : l’exécution parfaite des deux katas que tu as sélectionnés. Deux parmi la liste ci-dessous :
- Kata n°1 – Heian Shodan
- Kata n°2 – Heian Nidan
- Kata n°3 – Heian Sandan
- Kata n°4 – Heian Yondan
- Kata n°5 – Heian Godan
- Kata n°6 – Tekki Shodan
Nous avons la chance de les avoir filmés dans un milieu calme et dédié aux arts martiaux, à voir ici :
Le(s) piège(s) à éviter
A l’évidence, ne pas connaître son kata. Il est donc essentiel de le répéter mentalement tous les jours te plusieurs fois par jour, comme le font les athlètes de haut niveau qui répètent mentalement les mouvements. Pensez au perchiste qui retrace en lui-même le saut parfait, ou le skieur qui visualise la piste avant de s’élancer.
Autre piège : oublier les Kiaï. Cela arrive fréquemment. Ils sont les « highlights » du kata donc les omettre est lourdement sanctionné.
Dernier impératif : le cérémonial… Ne pas le respecter serait une très mauvaise entrée en matière. Donc on le répète ensemble… Entrée sur l’aire : salut du jury. Avancer au milieu : Position Yoi. Salut du jury et annonce du nom du Kata (avec une voix forte et affirmée). Exécution du kata. A la fin retour en position Yoi, le dos droit, le regard vers l’avant, déterminé. Puis nouveau salut du jury. Dernier salut avant la sortie. Si tu visualises le tatami comme « aire de travail », tu salues 4 fois : en entrant de la zone, au début du kata, à la fin du kata et avant de sortir de la zone.
La vraie difficulté
Dans l’hypothèse où on te fait enchaîner les deux katas avec juste 30 secondes de récupération au milieu, la tentation pourrait être grande de ne pas se donner à fond sur le 1er. Ne me dis pas que tu y as pensé ??? Et bien oublie cette pensée. Le 1er à fond. 30 sec de récup. Le 2nd pleines balles !
Nos conseils
Ce qui veut dire qu’en réalité, une fois que tu connais bien chaque kata, durant la dernière phase de révision, tu dois considérer l’ensemble comme un seul et même kata et travailler ce module en un bloc, de sorte que le jour J, ton cerveau a « engrammé » la séquence totale. Tu entres dans le tunnel Kata en une seule fois et tu en sors une fois les deux katas exécutés.
Conseil essentiel : ne pas s’économiser et prendre des risques, car sinon ça s’appelle de la gestion et ce n’est pas digne de la philosophie des créateurs du karaté. Respecte les, respecte-toi et fais en sorte, non seulement d’avoir ta ceinture noire, mais avec un sentiment de fierté et du devoir accompli.
Dernier truc, prends du plaisir. Le passage de grades 1er dan, ce n’est pas comme l’amour, ça n’arrive qu’une fois dans ta vie (seulement si tu n’échoues pas mais forcément, si tu suis nos conseils, tu l’auras du premier coup). Si tu es tout stressé et que seul le résultat compte, tu rates l’essentiel. Passer ses grades en y prenant du plaisir est tellement jouissif…
Ah si, essentiel aussi, pense à te faire conseiller sur le choix des deux katas. Ton sensei saura te guider vers les deux qui correspondent à tes qualités intrinsèques. Souvent, on choisit un kata qui ne « nous va pas ». Un conseil judicieux permettra de choisir les deux katas les plus adaptés à tes qualités intrinsèques (ou un terrain mouillé…)
Comment s’entraîner ?
Principe n°1 – regarder les vidéos des katas sur Karaté Expert et ailleurs pour voir les différences de style et les points permanents et non modifiables.
Principe n°2 – pratiquer chaque semaine au dojo ou chez toi, à vitesse lente et rapide, en s’imposant de l’exécuter à 100% au moins une fois par semaine.
Principe n°3 – se filmer et observer, en comparant son kata à celui des vidéos réalisées par des experts. Une étape pas facile car peut avoir un problème avec son image. Cependant cette technique est vitale et une fois le choc de se voir passée, on se familiarise avec l’outil et on progresse à pas de géant, notamment sur les détails. Un smartphone suffit et vous pouvez le positionner pour vous filmer seul si besoin.
Principe n°4 – visualiser mentalement comme les font les sportifs de haut niveau pour que votre cerveau engramme la totalité de l’exercice.
Principe n°5 – solliciter la critique des autres pratiquants, ce qui va vous obliger à donner le meilleurs de vous-mêmes, de vous habituer à pratiquer le kata face à des gens qui vous scrutent et vous apporter de précieux conseils.
Principe n°6 – aller au cours spécifiques Kata de ton club, le meilleur moyen de progresser.
Comment je l’ai vécu ?
Plutôt bien. Quand j’ai passé ma ceinture noire, il fallait maîtriser la totalité des 6 katas car on présentait le kata de son choix et le second était tiré parmi les 5 qui restaient. J’avais choisi Heian Sadan pour son côté puissant et il est passé tranquille. Puis j’ai tiré au sort Heian Yondan et je me souviens d’une anecdote. Dans ce kata il y a un passage très intense qui correspond au 1er Kiaï et avec le stress, je suis parti un peu trop près de la table du jury, si bien que sur ce mouvement, je suis arrivé avec le corps super proche de la table et le poing pas très loin du visage d’une fille du jury. Avec le Kiaï balancé avec toutes mes tripes, ça les a bien réveillés… 😉
En conclusion ?
Bosse, bosse, bosse !
Je trouve vraiment bien vos articles. Pour ma part, je suis au Québec et je me demande pourquoi, d’une école à une autre, certains katas sont demandés (Jinro Shodan par exemple) ou les Taikyoku. Car avec ceux-ci, il y a plus de 26 katas…